Les semis intérieurs
Pour maximiser la qualité, la résistance et le rendement des cultures, on doit les établir à partir de plants biologiques. Comme de tels plants sont rares et coûteux, il est avantageux de les produire soi-même. En plus d’assurer une meilleure qualité de plants, la démarche permet de choisir ses cultivars.
L’environnement de la chambre à semis
Pour réussir ses semis intérieurs, on doit d’abord créer un environnement approprié. De 14 à 16 heures de lumière par jour sont nécessaires à la croissance des jeunes plants. Une pièce avec de grandes fenêtres orientées vers l’est ou vers le sud répond partiellement à leurs besoins. Comme la lumière est latérale et que la photopériode en mars et en avril est encore trop courte, on doit prévoir un éclairage d’appoint. Des fluorescents de type Cool White en présence de lumière naturelle conviennent très bien. En absence de lumière naturelle, on optera pou des fluorescents à spectre complet, plus coûteux. On trouve aujourd’hui de nombreuses boutiques spécialisées en éclairage artificiel où on reçoit en général de bons conseils.
On doit également pouvoir contrôler la température de la chambre à semis. La température optimale moyenne pour la germination des semences est de 25 °C, alors que pour la croissance, elle est de 20 à 22 °C le jour et de 15 °C la nuit.
Une petite serre constitue l’endroit par excellence pour partir des plants. Elle commande cependant des investissements pour sa construction et son chauffage. Une pièce de la maison peut facilement se transformer en pouponnière sans nécessiter de déboursés ; elle a de plus l’avantage d’être déjà chauffée. Il s’agit d’y organiser l’éclairage d’appoint.
Les contenants
On cultive habituellement les semis dans des caissettes qu’on peut réutiliser d’année en année. Les caissettes standards mesurent 16 cm x 30 cm. On en trouve en polystyrène, en fibre ou en plastique, ouvertes ou divisées en cellules. Je préfère celles en polystyrène sans division. On peut en récupérer facilement au printemps.
Certaines espèces comme les membres de la famille des cucurbitacées ne tolèrent pas le repiquage ; on recommande d’employer pour leur multiplication des pots individuels de 8 à 15 cm de diamètre.
Les terreaux
Les terreaux employés pour produire les plants revêtent une grande importance. En travaillant avec du compost végétal (un compost de feuilles par exemple), notamment pour le terreau de germination, on maximise les résultats tout en minimisant les risques de fonte des semis ou de salinité excessive, nuisible pour certains plantules, par exemple de laitue et d’oignon. On trouve en jardinerie différentes formules de terreau biologique pour ceux qui n’ont pas le temps de procéder à leur propre mélange.
Le terreau de germination
20 % de compost mûr, 40 % de perlite, 40 % de fibre de coco
Le terreau de croissance
40 % de compost mûr, 30 % de perlite, 30 % de fibre de coco
Ces 2 terreaux permettent dans la plupart des cas de rendre les jeunes plants à maturité sans autre fertilisation. Ils conservent bien l’humidité tout en se drainant rapidement de leur excédent d’eau. On ne doit pas les stériliser. Des expériences faites avec un terreau fait de 9 parties de compost de feuilles très mûr et de 1 partie de sable donnent de bons résultats pour la germination et pour la croissance; cette recette permet d’éviter l’emploi de vermiculite et de perlite, des matériaux minés, importés et produits par un procédé très énergivore. Le mélange des ingrédients se fait au volume. Une fois les ingrédients mêlés, le terreau est légèrement humidifié, puis disposé dans les caissettes sans être compacté. On est alors prêt à procéder au semis. On utilise le terreau de germination pour le semis et le terreau de croissance pour le repiquage.
Le semis
On sème la plupart des espèces en caissettes, dans un terreau de germination, à la volée ou en rangs, selon l’espèce et le nombre de plants souhaités. Pour les espèces sensibles au dérangement racinaire comme les membres de la famille des cucurbitacées, il est préférable de semer directement en pots individuels.
On recouvre les semences de 3 fois leur épaisseur de terreau. On arrose ensuite le terreau avec une eau tiède et on place les contenants dans un endroit chaud de la maison. Il ne faut pas oublier de bien identifier les cultivars. Des bâtonnets à café en bois marqués au crayon de plomb conviennent bien à cet usage. Par la suite, le terreau sera maintenu humide, mais sans excès. L’arrosage se fait de préférence avec un arrosoir à bec inversé qui crée un jet fin, moins susceptible de déplacer les semences et d’écraser les jeunes plants. Il faut toujours employer de l’eau tempérée. Quelques jours plus tard, les cotylédons (les 2 premières feuilles) devraient faire leur apparition. Il faudra dès leur émergence octroyer aux plants de 14 à 16 heures de bonne lumière par jour, à défaut de quoi ils s’étioleraient, ce qui les affaiblirait.
Le repiquage
Une fois les 2 premières vraies feuilles bien épanouies, on procède au repiquage des jeunes plants (les premières vraies feuilles sont celles qui apparaissent après les cotylédons). Le repiquage est une technique qui consiste à transplanter les plantules dans un terreau de croissance en leur octroyant l’espace nécessaire pour compléter leur développement. Le repiquage stimule la croissance des jeunes plants en favorisant la formation de nouvelles racines le long de la tige enterrée. Il atténue aussi les effets de l’étiolement. Parfois, un deuxième repiquage en pots s’avère bénéfique. On ne repique pas les oignons, les poireaux, les concombres, les courges et les melons.
La fonte des semis
Durant la croissance des plants, l’irrigation est importante à surveiller. Un excès d’humidité ouvre la voie à l’apparition de la fonte des semis, fatale pour les jeunes plants. Cette infection est causée par un champignon qui se développe à la surface du terreau. Il provoque l’étranglement des jeunes plants, qui deviennent alors minces comme un fil au collet. Un mauvais terreau (fait avec du compost trop jeune ou animal), des températures fraîches ou un excès d’humidité sont les principales causes de la fonte des semis. En principe, les plants ne sont irrigués que les matins de journées ensoleillées. On arrose rarement par temps nuageux. Il faut toutefois tenir compte de l’évaporation causée par l’éclairage. Le terreau devrait idéalement être sec en surface avant de procéder à un nouvel arrosage.
Pour prévenir ou contrôler la fonte des semis, on peut arroser les plants avec une décoction de prêle ou une infusion de camomille.
La décoction de prêle
Faire mijoter 100 g de prêle séchée dans 5 litres d’eau pendant 30 minutes. Laisser infuser pendant 12 heures. Pour contrôler la fonte des semis, on arrose avec la décoction pure. Pour la prévenir, on utilise la décoction diluée dans un même volume d’eau. La prêle devrait idéalement être récoltée au solstice d’été, moment où sa concentration en silice est la plus forte. On sèche la prêle en bouquet, tête en bas, dans une pièce sombre et bien ventilée.
L’infusion de camomille
Faire infuser 7 g de camomille par litre d’eau. Pour prévenir la fonte, on arrose avec l’infusion refroidie.
La fertilisation
Lorsque le compost employé pour fabriquer le terreau est de bonne qualité, il recèle en principe tous les éléments nutritifs dont les plants ont besoin pour se rendre à terme. Si des carences en azote (feuillage pâle) ou en phosphore (feuillage violacé) se manifestent, on emploie en fertigation (combinée à l’eau d’arrosage) une solution d’hydrolysat de poisson et d’algues liquides à raison de 10 ml chacun par litre d’eau. Il faut s’assurer que l’émulsion contient suffisamment de phosphore.
L’acclimatation
Avant la transplantation des plants, il importe de les acclimater. L’acclimatation consiste à exposer graduellement les jeunes plants aux éléments extérieurs, soit au vent, au soleil et au froid. Les premiers jours (choisir des journées nuageuses), on ne sortira les jeunes plants que quelques heures ; puis, on accroît leur temps d’exposition jusqu’à ce qu’ils soient entièrement adaptés à leur nouvel environnement.
Yves Gagnon
Auteur et semencier
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